Axe intestin-cerveau : un ascenseur vers la sagesse ?
Le secret de la sagesse se cacherait-il dans votre ventre ?
Par Nicolas Wirth (pas publié dans son intégralité) et Gesa Kaehlbrandt

Chère lectrice, cher lecteur,
Vous imaginez peut-être que la sagesse vient avec l’âge, l’expérience ou la méditation.
Mais si je vous disais que votre microbiote intestinal joue un rôle clé dans votre capacité à être sage et à bien vivre la solitude ?
C’est la surprenante découverte qu’a faite récemment une équipe de chercheurs.
Leurs travaux révèlent des liens étonnants entre la composition de notre microbiote intestinal et notre niveau de sagesse.
De grands maîtres comme Socrate, Confucius ou le Dalaï-lama auraient-ils bénéficié d’un avantage caché, niché au plus profond de leur ventre ?
Axe intestin-cerveau : un ascenseur vers la sagesse ?
Mais alors, comment notre ventre peut-il influencer nos pensées, nos émotions et même notre sagesse ?
L’explication tient dans ce dialogue permanent établi entre notre cerveau et notre microbiote, via ce que l’on appelle l’axe intestin-cerveau.
Par exemple, la sérotonine, surnommée hormone du bonheur, régule essentiellement les fonctions cérébrales alors qu’elle est produite à plus de 90% par nos bactéries intestinales.
Plusieurs travaux ont également mis en évidence les liens étroits entre microbiote et maladies « psy » comme la dépression, la schizophrénie ou les troubles bipolaires.
Début 2021, la revue Frontiers in Psychiatry a publié les résultats d’une toute nouvelle étude qui en dit long sur les liens entre microbiote et cerveau[1].
Les personnes les plus sages auraient un microbiote différent de celles qui ressentent le plus la solitude.
Car oui, d’après des travaux scientifiques très sérieux, les personnes que l’on considère comme sages sont moins enclines à souffrir de la solitude.
Charles Baudelaire l’affirmait déjà il y a plus d’un siècle : « La sagesse consiste à savoir peupler sa solitude et à s’isoler parmi la foule ».
Voici comment s’est déroulée l’étude en question :
On a donné à 187 participants âgés de 28 à 97 ans des questionnaires pour évaluer leur sentiment de solitude, leur niveau de sagesse, leur aptitude pour la compassion, ou leur engagement au niveau social.
Les chercheurs ont ensuite mis en relation les résultats de ces tests avec la composition de leur microbiote (par des techniques de pointe basées sur la métagénomique, j’y reviens plus loin), pour avoir une représentation de :
- La diversité du microbiote des participants (ou diversité alpha)
- La nature des différentes communautés de bactéries (c’est-à-dire lesquelles sont bénéfiques ou non, c’est la diversité bêta)
Conclusion : les personnes qui ressentent peu la solitude et ont un « haut niveau de sagesse » disposaient d’une plus grande diversité de leur microbiote.
C’était aussi le cas des personnes douées pour la compassion et qui disposaient d’interactions sociales plus riches que les autres.
La solitude peut aussi changer votre microbiote !
Ces résultats sont déjà exceptionnels en soi mais le Professeur Jeste, l’un des auteurs de l’étude, va plus loin en disant que « la solitude peut entraîner des changements dans le microbiote intestinal ou réciproquement, des altérations du milieu intestinal peuvent prédisposer un individu à devenir solitaire… ».
Cette relation de cause à effet irait donc dans les deux sens !
Je trouve cette expérience passionnante car elle met en avant trois pôles essentiels pour notre santé que nous devrions cultiver et enrichir :
- Notre équilibre émotionnel
- Nos interactions sociales
- La diversité de notre microbiote
À eux seuls, ces trois pôles pourraient presque suffire à nous protéger des maladies de civilisation, de l’inflammation, des infections virales ou bactériennes, des allergies, de la dépression qui sont toutes en relation avec notre équilibre intestinal.
Mais alors, comment savoir si notre microbiote est dans une bonne dynamique ?
Heureusement, des tests de pointe permettent aujourd’hui de dresser une véritable cartographie de notre microbiote.
On ne lit plus dans le marc de café mais dans les matières fécales !
Pour explorer le microbiote, beaucoup de médecins ou de thérapeutes s’en tiennent encore aux tests d’ancienne génération comme la coproculture.
Bien sûr ces analyses sont encore utiles en cas d’infection intestinale (bactérienne ou fongique) ou de pathologies précises (maladie digestive, immunodéficience, etc.).
Mais elles sont incapables d’évaluer la diversité de notre microbiote, ni de connaître les différentes familles de bactéries qui le composent.
Or, les recherches tendent à montrer que ce sont les deux notions les plus importantes pour notre santé !
Les analyses du microbiote sont une véritable bénédiction pour notre santé car cela permet de voir à quoi notre microbiote nous prédispose en termes de maladies. Elles peuvent aussi déceler différentes problématiques comme :
- Une dysbiose (déséquilibre du microbiote)
- Une inflammation
- Et surtout : un manque de diversité bactérienne qui prédispose à de nombreuses maladies
Voici un exemple de résultats que l’on peut obtenir. Ce schéma rend compte de la répartition de bactéries (ce sont les noms des différentes familles de bactéries) dans un microbiote sain :

Ces analyses (coût environ 199 Euro) sont fondamentales pour évaluer l’état de votre microbiote, véritable pilier de votre santé globale, physique et mentale.
Pour le dire différemment : Faire analyser son microbiote, c’est un peu comme faire un check-up de son écosystème intérieur – essentiel pour savoir où vous en êtes, et comment optimiser votre santé globale !
Ce qui compte aussi, c’est ce que VOUS allez changer dans votre vie pour améliorer votre microbiote.
Compte tenu de ce que nous apprend cette nouvelle étude, je vous invite à aller plus loin : stimuler et optimiser vos polarités cerveau-intestin afin que l’un et l’autre s’enrichissent mutuellement.
Si notre microbiote peut influencer notre sagesse, cela signifie que nous avons un rôle actif à jouer.
Mais concrètement, quelles sont les qualités qui définissent une personne sage ? Voici ce que la recherche nous enseigne…
10 qualités à cultiver pour devenir un grand sage
Je ne vais pas vous donner des leçons de sagesse, mais de jardinier. Car après tout, il s’agit de cultiver, d’un côté, notre microbiote, de l’autre, les qualités qui prédisposent à la sagesse…
Mais qu’est-ce que la sagesse au juste ?
Pour Fréderic Lenoir, philosophe, sociologue, chercheur et auteur de La sagesse expliquée à ceux qui la cherchent[2], la sagesse est : « un art de respirer, de manger, de penser, de sentir, de ressentir, de regarder, d’écouter, de savourer, de toucher, d’aimer (…). »
Autrement dit, elle découle de notre qualité de présence.
L’une des techniques les plus recommandées (et la plus étudiée) pour l’améliorer est la méditation de pleine conscience, ou mindfulness.
Pratiquée régulièrement, seule ou en groupe, elle peut vraiment changer notre rapport au temps et à la vie elle-même.
Mais la sagesse peut englober bien d’autres qualités.
Dans les années 1980, des spécialistes de l’Institut Max Planck à Berlin ont listé un ensemble d’aptitudes qui pouvait définir la sagesse[3] :
- L’humilité
- La connaissance intellectuelle
- Du discernement
- Une très bonne aptitude à résoudre les problèmes
- Une capacité à tirer des leçons de ses expériences
- La connaissance factuelle du monde qui nous entoure
- La capacité à se ressaisir à la suite d’un échec (résilience émotionnelle)
- Une qualité d’ouverture et de maturité qui permet d’accepter sereinement d’être perçu tel qu’on est par les autres
- Une compréhension profonde de la nature humaine et une empathie pour ceux qui sont différents ou pour les autres cultures.
Cette définition jette quelques jalons sur le chemin de notre évolution personnelle. Elle nous invite à sortir de notre zone de confort, à faire preuve d’ouverture, d’humilité, de gratitude, à nous cultiver davantage, à apprendre de nos erreurs…
Voilà pour le sens cerveau-intestin. À présent, il ne reste plus qu’à cultiver notre microbiote !
Conseils pour diversifier et enrichir votre microbiote
Avant de vouloir modifier votre microbiote, il peut être utile d’évaluer son état actuel par une analyse de selles, comme nous l’avons vu plus haut, afin d’évaluer les diversités.
Mais dans tous les cas, vous aurez tout à gagner à optimiser la diversité de votre microbiote en suivant ces quelques conseils :
- Pensez « diversification » alimentaire car plus vous mangez varié, plus vous nourrissez des familles différentes de bactéries.
- Évitez les restrictions alimentaires non nécessaires : par exemple, si le gluten moderne est à éviter, la privation de tout gluten sans bonne raison peut engendrer une diminution des bonnes bactéries du microbiote et une augmentation des entérobactéries (dont certaines peuvent favoriser les infections)[4].
- Mastiquez longuement vos repas pour améliorer la digestibilité des fibres utiles aux bactéries intestinales.
- Privilégiez une alimentation riche en polyphénols : ils s’opposent aux bactéries pathogènes et protègent les bonnes
- Penchez pour une alimentation de type méditerranéen reconnue pour augmenter la présence de bonnes bactéries comme les bifidobactéries, les lactobacilles, Eubacterium et Prevotella[5].
- Mangez beaucoup d’aliments riches en prébiotiques : ail, artichaut, asperge, chicorée, oignon, panais, poireau, petit épeautre entier, orge, seigle, topinambour.
- Mangez très souvent des légumes lactofermentés (faits maison si possible) riches en pré et probiotiques
- Fuyez les additifs, colorants ou exhausteurs de goût (plats préparés…) ou produits phytosanitaires (alimentation non bio) qui perturbent le microbiote mais aussi le tabac, l’alcool, les IPP[6].
- Faites du sport, il stimule la diversité bactérienne. Gare à l’excès cependant qui peut nuire au microbiote.
Cette étude est une preuve de plus qu’on ne peut pas morceler le corps ou le détacher de l’esprit et que la pleine santé doit être holistique.
Et pour finir : Quel est l’impact du jeûne sur la diversité de mon microbiote ?
Pour moi, il est particulièrement intéressant d’observer l’évolution de la composition de mon microbiote intestinal avant et après une période de jeûne. Mon objectif initial est de vérifier si, par le biais de mon alimentation, j’ai pu favoriser un microbiote diversifié et équilibré – condition essentielle au bon fonctionnement du cerveau, notamment via l’axe intestin-cerveau.
J’ai récemment envoyé un premier échantillon de selles à un laboratoire pour analyse, avant d’entamer ma prochaine cure de jeûne. Dans une semaine, je jeûnerai en Allemagne, et à l’issue de cette semaine, je ferai parvenir un second échantillon à un laboratoire français. Chaque analyse coûte 199 euros, mais elle me permettra d’obtenir des données concrètes sur l’état de mon microbiote et sur l’impact réel d’un jeûne de sept jours.
Cette démarche me permettra de répondre à deux questions fondamentales :
- Mon mode de vie et mes choix alimentaires permettent-ils de maintenir un microbiote optimal ?
- Quels sont les effets mesurables d’une cure de jeûne sur la diversité bactérienne intestinale ?
Car, comme le montrent de nombreuses études récentes (Cryan et al., 2019 ; Mayer et al., 2022), il existe une corrélation étroite entre la santé du microbiote intestinal et les fonctions cognitives, l’humeur, voire le comportement. Ce que nous pensons et ressentons est, dans une large mesure, influencé par ce que nous mangeons.
La relation intestin-cerveau pourrait nous évoquer la symbolique du lotus pour le bouddhisme tibétain : la fleur représente la pureté du cœur et de l’esprit mais elle prend racine dans la vase, là où elle puise ses ressources…
- Si vous souhaitez en savoir plus ou
- vivre vous-même cette expérience transformatrice ou
- si vous souhaitez VOUS engager pour votre santé globale pour bien vieillir et devenir sage

Je vous invite chaleureusement à participer à l’un de mes stages de jeûne et randonnée. Vous y découvrirez
- non seulement les effets physiques du jeûne, mais aussi
- ses bénéfices neurologiques et émotionnels ainsi que
- la transformation de votre microbiote intestinal pendant cette cure
- la valeur inestimable de jeûner en groupe
- des informations précieuses pour un après jeûne et « comment me détoxifier au quotidien » d’une manière simple et efficace
Au plaisir de vous donner de plus amples informations,
chaleureusement,
Nicolas Wirth et Gesa Kaehlbrandt

1] Tanya T. Nguyen et al. Association of loneliness and wisdom with gut microbial diversity and composition: an exploratory study. Frontier of psychiatry, 25 mars 2021.
[2] Éditions Le Seuil, 2018
[3] Weisheit im Kontext von Person, Situation und Handlung, Doris Sowarka, Berlin, Max-Planck-Institut für Bildungsforschung, 1989.
[4] Lea B. S. Hansen, Henrik M. Roager. A low-gluten diet induces changes in the intestinal microbiome of healthy Danish adults. Nature Communicationsvolume 9, Article number: 4630 (2018).
[5] Singh, R. K.et al. Influence of diet on the gut microbiome and implications for human health. J. Transl. Med.15, (2017).
[6] Inhibiteur de la pompe à protons prescrits en cas de troubles gastriques.





















